vendredi 25 mars 2011

Quelle palestine pour les Palestiniens? suite

Maintenant que je suis rentrée en France,je peux enfin exprimer mon ressenti sur la fin de mon Pèlerinage...
Je suis arrivee dans ce Pays en entrant par la Cisjordanie, grand territoire palestinien de plus en plus morcelé par les colonisations juives, qu'elles soient agricoles ou citadines. Tout bon observateur peut distinguer d'ailleurs les propriétaires des terrains à l'état des cultures: bien irriguées chez les Colons, peu pourvues en eau chez les Palestiniens gravement rationnés... Les irrigations intensives ont fini d'ailleurs par appauvrir le Jourdain,seul fleuve desservant à la fois l'Etat et la Jordanie voisine qui souffre aussi de cet état de fait.
Au niveau général des conditions de vie dans l'Etat,il faut savoir aussi que seulement 10% des eaux usées par les implantations israelites sont recyclées et le reste est déversé sans scrupule dans les nappes desservant les autres zones... Dans les quartiers musulmans de Jérusalem, les ordures sont souvent "oubliées" par les ramassages, renforçant l'idée que les Musulmans sont sales et peu soucieux de leur environnement(les Chrétiens de ces quartiers subissent la même discrimination). Un argument de plus pour justifier des expulsions régulières pour raisons sanitaires, maisons détruites et vite remplacées par des implantations d'immeubles à usage exclusif des Juifs, avec beaucoup d'espaces verts et de zones de jeux pour les enfants, dans un parc bien fermé et gardé!
A Jérusalem, les flancs du Mont des Oliviers sont recouverts chaque jour un peu plus de tombes agrandissant les immenses cimetières juifs, continuant à gagner sur les zones "évacuées". Ils sont ainsi assurés d'être les premiers à partir, au moment du jugement dernier...
Les ghettos palestiniens, eux, n'offrent guère de place pour jouer aux nombreux enfants qui y habitent, à cause de la haute densité de population concentrée dans un petit espace, cernés par les murs-frontières de l'infamie, si difficiles à franchir pour les habitants n'ayant pas la nationalité israelienne. Il y a de nombreux camps de réfugiés, pour la plupart aux maisons en béton, qui se retrouvent de plus en plus enclavés.
Le mur de Berlin, si décrié et à juste titre finalement démoli,n'était rien à côté de ces murs de l'infamie d'une hauteur de plus de 8m, avec miradors et filtrages draconiens, et grandes zones désertifiées et barbelées alentours; un cimetière musulman de la zone de Béthléhem a même été amputé d'un morceau où se trouve le tombeau de Rachel devenu inaccéssible aux fidèles.
J'ai moi-même ressenti, en passant à pied l'un de ces murs, la peur et le sentiment d'insécurité engendrés par un parcours de franchissement digne des couloirs menant les bêtes aux abattoirs... Curieusement, je me suis sentie mieux de l'autre côté et mon court séjour dans le Camp d'Aïda a contribué à me retaper au niveau moral après tant de sentiments de malaises envers cette situation dont j'avais vaguement entendue parler et que je pouvais maintenant palper et estimer à sa dure réalité...
Vous me direz que ces longs mois à cotoyer les musulmans, à fréquenter leurs foyers et leurs coutumes,ont terni l'objectivité de mon jugement.
Les Palestiniens, qu'ils soient Chrétiens ou Musulmans, souffrent tous de la même manière de la situation inextricable qui leur est imposée depuis des années, malgré les multiples résolutions de l'ONU qui ne sont pas respectées...
Afin de ralentir les départs de Chrétiens, certaines Communautés religieuses ont fini par construire des lieux de résidences pour les chrétiens pauvres sur les terres d'anciens monastères: les loyers y sont adaptés à leurs revenus et ils ne risqueront plus l'expulsion.
Quand je suis arrivée à Jericho, j'ai reçu un très bon accueil des Palestiniens et de leur police touristique qui m'a indiqué un raccourci par les montagnes du djébel pour rejoindre la Ville de Jérusalem. En empruntant cet itinéraire nettement plus court et plus agréable, j'ai pû cotoyer des bédoins sédentarisés dans leurs campements par la situation d'enfermement de plus un plus intense de leur territoire, gardant péniblement quelques brebis ou chèvres,quand ils sont chanceux,sur des terres ingrates dont ils peuvent être expulsés à tout moment.
En zone palestinienne, les polices locales ne portent la plupart du temps qu'une longue matraque, alors que les policiers ou soldats israeliens,en uniformes ou en civil ont tous des armes imposantes, y compris en zones urbaines et touristiques, notamment autour des Lieux Saints de toutes confessions.
Autour des villes ou villages palestiniens, des collines ont été déboisées entièrement pour implanter des zones résidentielles, avec routes spécialement construites pour les desservir; la sélection pour les circulations de véhicules se fait par les plaques d'immatriculations différentes selon les différents critères d'appartenance religieuse ou géographiques. Les check-points ne sont d'ailleurs pas les mêmes selon l'origine du véhicule.
Les quelques palestiniens de Jérusalem, ayant accepté de garder la nationalité israelienne, sont un peu plus libres de leurs mouvements mais ne peuvent recevoir la visite du reste de leur famille qui réside dans d'autres zones.
Comment un Peuple et des Religieux, qui ont tant souffert par le passé des discriminations, des mises en ghettos, d'enfermements et d'exterminations par les nazis, peuvent reproduire à ce point des situations au combien difficiles pour les autres? La Religion peut-elle tout permettre sans respecter les Autres?
J'aurai voulu, par respect envers les souffrances de tous ces Juifs exterminés et tous ces Justes qui en ont sauvé d'autres, me rendre au Mémorial de Yad Vashem! Ma souffrance morale envers cette situation de faits, ressentie comme une insulte, m'a empêché de faire cette démarche...
Malheureusement, bon nombre de Pèlerins des Lieux saints ne se rendent pas compte de la dure réalité, éblouis par les beaux quartiers qu'on leur montre et ne restant pas assez longtemps pour s'imprégner de l'ambiance, traversant rapidement les zones concernées quand ils s'y rendent...

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